lundi 15 août 2016

Asthme

Savanes des pays essoufflés
sans autre félin que l'asthme
emmêlant mes bronches dans la noirceur.

Les enfants dorment. Je puise dans leur nuit claire
l'air comme l'eau l'assoiffé.

Fantômes

(texte rédigé pour une exposition de Mimosas Echard)

Doit-on avoir peur des fantômes ? Doit-on craindre leurs bruits, leur souffle, leurs
frôlements ? Si les fantômes sont tout autour de nous, comme nous le savons intuitivement,
comment doit-on les considérer ? Doit-on chercher leur présence, les solliciter, chercher à
communiquer avec eux ?
Il faut croire aux fantômes plus qu’aux anges, plus qu’aux démons, car ils sont la résultante
naturelle de toute interaction. Les anges sont des messagers de l’autre monde, les démons les
émissaires de son envers ; mais les fantômes sont d’ici et maintenant. Ils ne sont pas des
rémanences d’êtres disparus ou à venir, mais le produit de la juxtaposition : de deux lieux
(une maison bourgeoise et la nature qui l’encercle), de deux matières (des Marlboros piégées
dans la faïence et brûlées, jusqu’à ce que seule la pellicule de terre reste), de deux pensées (les
idéaux hippies convoqués à coups d’images de feu, du portrait de Frank Zappa ou d’un
cendrier psychédélique, confrontés à la peinture de Watteau et à la tradition classique
française), de deux temps (le XVII e siècle et le nôtre). Les fantômes se nourrissent de ces
accointances inattendues, et font le voyage de l’un vers l’autre, indéfiniment, tissant le fil
invisible d’un réel qui existe entre ces deux pôles, simplement entrevu le temps d’un
battement de cil.
Un fantôme naît chaque fois que deux lignes se croisent; les anges passent dans les silences,
les fantômes croissent dans les rencontres. C’est pourquoi les histoires d’amour et d’amitié
sont riches de fantômes, quand elles échappent au pourquoi de la psychanalyse et au comment
de la sociologie ; il en est ainsi des œuvres d’art, pour les mêmes raisons.
Le monde n’a pas besoin de fantômes, mais il les accueille avec joie. Car les fantômes ont
cette qualité d’emplir l’espace, jusqu’à créer de l’espace dans l’espace: plus il y aura de
fantômes, plus le monde s’agrandira, et il restera infiniment à découvrir de nouveaux
continents.

mardi 9 août 2016

Nuit


Vienne la nuit animale et violente,
Naisse le sommeil empreint d’un autre éveil,
Sorte de mes mains – sans que j’y compte – la musique
autre que la musique.

Glacial univers, songe sans songeur,
Tes enfants travaillent à te rendre vivant.